Ages et transmissions https://agesettransmissions.be/ Créée en 97, Ages et Transmissions est une asbl pluraliste bruxelloise permettant aux aînés de jouer un rôle actif dans la société. Elle est reconnue comme organisme d'éducation permanente par la Fédération Wallonie-Bruxelles. fr SPIP - www.spip.net Ages et transmissions https://agesettransmissions.be/local/cache-vignettes/L144xH138/siteon0-31eb6.png?1703182657 https://agesettransmissions.be/ 138 144 Pourquoi avoir quitté la Hongrie ? (Elisabeth) https://agesettransmissions.be/spip.php?article1134 https://agesettransmissions.be/spip.php?article1134 2017-09-05T12:23:25Z text/html fr Sylvie (A&T) Solidarité Guerres autres <p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" Lire l'ensemble <br class='autobr' /> Ayant été sollicitée pour écrire sur les motivations qui ont poussé mes parents à quitter leur pays le 21 décembre 1957, il n'est pas simple pour moi de remonter l'horloge du temps de bientôt 60 années, surtout qu'il n'y a plus personne que je puisse interroger sur ce sujet. Donc je vais creuser en mes propres souvenirs et en ce que j'entendis raconter par mes parents plus tard. <br class='autobr' /> Ce que je (...)</p> - <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164" rel="directory">Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration (Elisabeth H.)</a> / <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot163" rel="tag">Solidarité</a>, <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot192" rel="tag">Guerres autres</a> <img class='spip_logo spip_logo_right spip_logos' alt="" style='float:right' src='https://agesettransmissions.be/local/cache-vignettes/L150xH97/arton1134-58baa.jpg?1703617991' width='150' height='97' /> <div class='rss_chapo'><p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" <a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164' class='spip_in'>Lire l'ensemble</a></p></div> <div class='rss_texte'><p>Ayant été sollicitée pour écrire sur les motivations qui ont poussé mes parents à quitter leur pays le 21 décembre 1957, il n'est pas simple pour moi de remonter l'horloge du temps de bientôt 60 années, surtout qu'il n'y a plus personne que je puisse interroger sur ce sujet. Donc je vais creuser en mes propres souvenirs et en ce que j'entendis raconter par mes parents plus tard.</p> <p>Ce que je sais, c'est qu'avoir changé de pays n'a pas trop bouleversé l'enfant de 8 ans que j'étais : l'enfant se sent toujours bien là où sont ses parents. Ce sont eux qui se sont chargés de tout le poids de la vie, ayant à coeur de nous laisser vivre le plus longtemps possible l'insouciance de l'enfance. Mes frères et moi ignorions tout concernant leur décision et les préparatifs se sont faits clans la plus grande discrétion. Nous n'avons même pas salué nos copains ou copines de classe avant de partir. En interrogeant aujourd'hui mes frères jumeaux, de trois ans mes aînés, eux non plus n'ont que peu de souvenirs.</p> <p>L'enfant ne regarde pas en arrière, il se projette toujours dans le futur. Ainsi, je ne garde de ma vie en Hongrie que des flashs, sans aucun autre ressenti que d'avoir été entourée, protégée par des parents aimants, d'une grand-mère, un parrain et une marraine et une tante encore célibataire. Il y avait aussi un cousin du même âge que mes frères ainsi qu'une cousine plus grande que nous mais qui ne partageait plus nos jeux.</p> <p>Du côté de papa il n'y avait plus de famille à part le grand-père paternel habitant à Budapest, qui se situait à 2.00 km au nord de notre ville. Il serait venu l'une ou l'autre fois pour passer Noël avec nous, mais je ne garde aucun souvenir de lui. Donc notre famille n'était pas bien grande. <br class='autobr' /> Aujourd'hui, ne restent plus que le cousin et la cousine, et la famille qui s'est agrandie par les mariages et les naissances.</p> <p>Pour comprendre le motif de notre départ, il faut que je raconte l'histoire de mon père.<br class='autobr' /> H est né le 25 juin 1914 à Budapest. Donc toute son enfance et sa jeunesse se sont déroulées pendant les années d'entre-deux guerres, dans la capitale, où la vie n'était pas facile ; à cette époque les gens vivaient mieux à la campagne, paraît-il. Après lui, avec quelques années de distance, mon grand-père ayant sans doute été mobilisé durant la guerre 14-18, sont nées encore deux petites soeurs. Ma grand-mère avait une santé précaire : une maladie l'a emportée trop tôt, laissant à charge de son mari deux petites filles autour de 10 ans et mon père qui devait avoir 15 ou 16 ans.</p> <p>Rapidement mon père devint apprenti dans un garage ce qu'il n'aimait pas. Voulant continuer ses études, dès que possible, il les a financées lui-même et s'est retrouvé avec des futurs ingénieurs sur les bancs d'école en cours d'après-midi et en cours du soir. Son diplôme en mains, il n'échappa pourtant pas au service militaire qui était de 4 années. Comme la guerre s'était déclarée entretemps, il a investi 7 années de sa vie au service de son pays. Donc il était décidé de rattraper au plus vite le temps perdu.</p> <p>Avant même sa totale démobilisation, étant donné son diplôme, il a obtenu une place stable comme ingénieur de ponts et chaussées. Il s'établit dans notre ville où il prit un logement chez l'habitant, un couple très gentil. Assez rapidement, ce couple lui a présenté une jeune fille à marier qui fut ma mère. Tous deux avaient déjà 31 ans, voulaient se marier et fonder une famille. Le mariage s'est fait simplement, le 2 décembre 1945, en plein hiver.</p> <p>Papa avait un métier de direction. Il était chargé de faire remettre en état les routes dans toute notre province et pour cela il avait une équipe d'ouvriers sous ses ordres. Mes parents habitaient une maison de fonction où, l'année après leur mariage, l'arrivée de jumeaux a donné le bonheur et la fierté à mes parents. Cette fonction-là, papa n'a pas pu la garder plus de 4 ou 5 ans.</p> <p>Après la guerre, les russes n'ont jamais tout à fait quitté la Hongrie et le régime communiste devint de plus en plus oppressant. Tout le monde devait se faire membre du 'Parti', surtout ceux qui occupaient une fonction importante dans la société. Papa, donnant le mauvais exemple à ses ouvriers en refusant de se faire communiste, a été invité à céder sa place, non pas à un plus compétent que lui, mais à un plus obéissant. A cette époque, il fallait suivre les indications d'une famille politique manipulatrice et de plus en plus corrompue.</p> <p>Durant les 7 années de service militaire, il avait suffisamment obéi à des « ordres stupides » comme il disait, donc il était décidé dorénavant à mener sa vie en suivant d'autres valeurs.</p> <p>Il obtint une place à la banque régionale de sa ville. Là, il avait une bonne vue sur les magouilles et les dépenses absurdes dans la gestion du bien commun. Comme il n'avait pas un caractère à garder sa langue en poche, il revendiquait la liberté d'expression et de foi. Tous les dimanches il se rendait à l'église du centre-ville avec sa famille. Nous, les enfants, suivions le cours de religion et allions au catéchisme pour faire notre première communion. Ceci n'était pas au goût du régime communiste qui rassemblait les enfants, étonnamment tous les dimanches matin et les congés scolaires, pour les endoctriner.</p> <p>Un jour, papa fut convoqué devant un conseil où les accusations pleuvaient. Il s'est défendu bec et ongles, connaissant bien tous les articles de loi du nouveau régime, en stipulant les failles et les contradictions que comportaient les accusations. Il fût relâché avec les avertissements nécessaires de se tenir calme car, une prochaine fois, il n'échapperait plus à une condamnation et un enfermement.</p> <p>En octobre 1956, il y eut l'insurrection : les étudiants et la classe intellectuelle en avaient assez de l'oppression russe et voulaient gérer le pays sans ingérence. Ce fut un bain de sang. Comme c'étaient les débuts de la télévision, ici en Belgique, la TV diffusait en continu les événements qui se déroulaient à Budapest et dans les autres grandes villes du pays. Les chars russes sont parvenus à réprimer l'insurrection. Après quoi, ce fut le départ massif de beaucoup de Hongrois qui ne pouvaient plus accepter l'oppression et ceux qui avaient participé activement à la révolution, craignaient pour leur vie. En effet, ont suivi des interrogatoires musclés et des actes de torture pour obtenir des dénonciations, de fausses accusations. Et avec cela, des enfermements, des exécutions, des pendaisons, des déportations en Sibérie, des accidents provoqués pour faire disparaître des personnes gênantes...</p> <p>Mon père n'a pas pris part active à cette insurrection, ne voulant pas compromettre sa famille. Toute la population pourtant a subi les conséquences de cette révolution d'octobre. Je me souviens très vaguement d'une anecdote où, un soir, mes parents nous ont avertis que nous irions peut-être nous réfugier à la cave la nuit. Ce ne fut pas nécessaire. Moi, comme enfant, je n'ai aucun autre souvenir de cette période. Les grandes personnes recevaient de jour en jour les nouvelles de proches qui disparaissaient et ils vivaient dans l'angoisse de ce qui pouvait bien encore leur arriver.</p> <p>La vie de tous les jours serait désormais différente après cette insurrection étouffée.</p> <p>A un certain moment, mon père apprit que des juifs avaient obtenu des papiers pour émigrer en Amérique. Il s'est dit : je ne suis pas juif et je ne veux pas aller en Amérique, mais j'ai deux soeurs qui habitent depuis de longues années en Belgique. Je vais faire la demande pour les rejoindre avec toute ma famille, on verra bien.</p> <p>Durant les années '30, la Belgique avait organisé des vacances pour des enfants hongrois dans des familles d'accueil. Ils arrivaient par trains entiers. Ainsi les deux soeurs de papa sont venues en Belgique, une à Poperinge et l'autre à Ypres. Les familles belges respectives les faisaient revenir les années suivantes aussi. Lorsqu'elles devinrent adultes, elles ont décidé de rester définitivement en Belgique. Tante Thérèse s'est mariée assez tardivement et a eu un fils. Tante Elisabeth ne s'est jamais mariée mais est restée habiter toute sa vie durant, dans sa famille d'accueil où elle a connu six générations.</p> <p>Donc papa, encouragé par ses deux soeurs et leurs familles respectives, a fait la demande de visa pour immigrer avec sa femme et trois enfants en Belgique. C'est invraisemblable, mais il a obtenu les papiers après avoir motivé sa demande. Naturellement, il ne pouvait invoquer le régime communiste qui ne lui convenait pas. II a donné comme motivation sa santé : en effet il n'y avait pas si longtemps qu'il avait été opéré d'un ulcère et que deux tiers de son estomac avait été enlevés. « Il voulait mettre ses enfants et sa femme en sécurité près de ses soeurs en Belgique, au cas où sa santé nécessiterait d'autres soins ».</p> <p>Pour les autorités hongroises c'était clair et net que notre départ serait définitif, sans possibilité de retour. D'ailleurs, tout ce que nous laisserions derrière nous serait confisqué. Ainsi, la femme et le fils d'un sergent nous ont été imposés et sont venus occuper la plus belle pièce de notre maison, déjà plusieurs mois avant notre départ. Après notre départ, ils habiteront toute la maison !</p> <p>Un jour, un photographe vint à la maison pour faire une série de photos. C'était certainement nécessaire pour ajouter le portrait de chacun de nous aux documents et pour donner un souvenir à la famille que nous laissions derrière nous ainsi qu'aux familles qui nous attendaient en Belgique.</p> <p>Dans un premier temps, les autorités belges ont mis leur veto pour nous accueillir pour une durée indéterminée : ils avaient donné accès à des milliers de réfugiés hongrois pendant et après la révolution d'octobre '56 et ils ne voulaient pas accueillir davantage de personnes. La famille belge de mes deux tantes a donné toute la garantie nécessaire aux autorités belges, pour notre accueil : elle assurait le travail pour papa, ainsi que le logement et notre mise en route pour débuter une nouvelle vie. Plus tard nous avons appris que la famille belge était même allée en pèlerinage à Lourdes pour confier à la Sainte Vierge la réussite de notre arrivée.</p> <p>Mes parents n'auraient jamais consenti à risquer le passage de la frontière ou du rideau de fer comme clandestins, risquant leur vie ou la nôtre. Etonnamment, tout s'est fait d'une manière entièrement réglementée.</p> <p>Nous sommes partis avec un jour de retard, parce que, arrivés à Budapest, les autorités de la gare devaient revérifier tous nos documents avant de délivrer le ticket de train. Plus tard, le train prit du retard à la frontière parce que, à nouveau, les gardes-frontières devaient téléphoner à Budapest pour se renseigner à notre sujet. Notre départ, retardé d'un jour, fut providentiel puisque le train que nous aurions dû prendre eut un grave accident en cours de route. La famille qui nous attendait, ayant appris l'accident au journal, était dans l'angoisse jusqu'au moment où un télégramme leur parvint annonçant notre arrivée.</p> <p>J'ai très peu de souvenirs concernant notre départ ainsi que de notre voyage en train. Je sais vaguement que nous avons dormi à Budapest, chez des amis de papa, les deux nuits avant notre départ. Moi je dormais sur deux fauteuils mis l'un en face de l'autre. Ensuite, je me vois dans le compartiment couchette de Vienne à Ostende où un filet fut tiré entre tes cieux couchettes d'en haut dans lequel je pouvais dormir. Pour le reste, je suppose que, pour les enfants que nous étions, mes frères et moi, le voyage devait être excitant, probablement aussi fatigant puisqu'assez long.</p> <p>Très étonnamment, je me souviens très bien de notre arrivée à Ostende, le 22 décembre 1957 et de l'accueil que la 'famille belge' nous fit. J'ai même le souvenir précis de la façon dont j'étais habillée... Étant la plus petite, je me suis sentie directement très entourée. Cette sensation n'a jamais été démentie et je me suis très vite acclimatée à mon nouvel entourage. Nous avons habité durant deux années et demie à Poperinge et j'en garde beaucoup de très bons souvenirs mais ce sera un nouveau chapitre à écrire.</p> <p><a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?article1135' class='spip_in'>Lire la suite</a><br class='autobr' /> </p></div> Premier Noël et début d'une nouvelle vie en Belgique (Elisabeth) https://agesettransmissions.be/spip.php?article1135 https://agesettransmissions.be/spip.php?article1135 2017-09-05T12:23:23Z text/html fr Sylvie (A&T) Ecole, études Solidarité <p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" Lire l'ensemble <br class='autobr' /> Trois jours après notre arrivée en Belgique, c'était Noël. Notre famille belge a tout fait pour nous rendre cette fête agréable. J'ai reçu une poupée avec de vrais cheveux mais elle n'a jamais remplacé ma poupée bébé, grandeur nature, qui était restée en Hongrie. Elle s'appelait Dodo. Plus tard maman a cousu toute une série de vêtements pour cette poupée pour que j'apprenne à la chérir mais rien (...)</p> - <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164" rel="directory">Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration (Elisabeth H.)</a> / <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot142" rel="tag">Ecole, études</a>, <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot163" rel="tag">Solidarité</a> <img class='spip_logo spip_logo_right spip_logos' alt="" style='float:right' src='https://agesettransmissions.be/local/cache-vignettes/L109xH150/arton1135-7be53.jpg?1703617991' width='109' height='150' /> <div class='rss_chapo'><p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" <a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164' class='spip_in'>Lire l'ensemble</a></p></div> <div class='rss_texte'><p>Trois jours après notre arrivée en Belgique, c'était Noël. Notre famille belge a tout fait pour nous rendre cette fête agréable. J'ai reçu une poupée avec de vrais cheveux mais elle n'a jamais remplacé ma poupée bébé, grandeur nature, qui était restée en Hongrie. Elle s'appelait Dodo. Plus tard maman a cousu toute une série de vêtements pour cette poupée pour que j'apprenne à la chérir mais rien n'y a fait, je ne l'ai jamais vraiment adoptée et elle ne reçut jamais de nom. Ma maman était gênée vis-à-vis de la famille qui me l'avait offerte.</p> <p>Nous habitions provisoirement dans une maison qui était destinée à la démolition. La maison qui était prévue pour nous n'allait se libérer que quelques mois plus tard. En attendant c'étaient le froid et l'humidité qui entraient par toutes les fissures mais il y avait quand même le strict nécessaire pour démarrer. Mes parents étaient étonnés de l'absence de salle de bain ; plus tard ils apprirent que la Belgique avait du retard sur la Hongrie en ce qui concernait le confort sanitaire. Même notre famille d'accueil qui était aisée n'avait de l'eau courante que dans la cuisine. Chaque chambre à coucher avait une crédence avec une bassine et une cruche assortie en porcelaine. Les lavabos n'existaient pas encore.</p> <p>La famille belge de ma tante Elisabeth possédait un grand magasin de meubles avec trois niveaux d'exposition et un coin où ils vendaient aussi des jouets. Dans un bâtiment annexe se trouvaient l'entrepôt de meubles et de jouets ainsi qu'un atelier. Plusieurs ouvriers y travaillaient et trois servantes s'occupaient du nettoyage, de la lessive et du ménage. Trois générations vivaient sous le même toit, avec en plus, ma tante. Les trois enfants de la famille se sont mariés l'un après l'autre ces années-là et ont quitté la maison. Mon père fut engagé pour le travail dans l'atelier et pour le transport des meubles ainsi que pour la conduite des trois camions de taille différente qu'ils possédaient. Il devait se rendre disponible selon les nécessités.</p> <p>Après les vacances de Noël, au mois de janvier, j'entrais dans ma nouvelle école (Grauwe Zusters Penitenten) en poursuivant ma 2ème année. J'ai le très bon souvenir que l'enseignante s'investissait pour que je m'insère au plus vite. Elle possédait un dictionnaire pour se faire comprendre. Les religieuses aussi qui tenaient l'école étaient bienveillantes envers l'unique élève étrangère que comptait leur école. Mes deux frères ont été accueillis au mois de janvier en 1ère primaire dans l'école des garçons. Ils y sont restés jusqu'aux grandes vacances. L'année d'après, ils ont refait la 5ème primaire qu'ils avaient entamée en Hongrie. Pour eux, ce changement et cette régression n'étaient pas à leur avantage.</p> <p>Quelques fois, les réfugiés hongrois des deux Flandres se rassemblaient. En y allant la première fois, mon père fut offusqué de la distribution de colis alimentaires. « Comment donc, je ne suis pas venu en Belgique pour recevoir la charité ! Je gagne ma vie et j'achète moi-même ce dont ma famille a besoin l » Il accepta néanmoins quelques jouets comme cadeaux pour les enfants. Il lui avait fallu déjà accepter le nécessaire pour redémarrer sa vie avec sa famille, c'était suffisant ! Nous n'aimions pas trop ces rencontres où chacun se plaisait à raconter son douloureux vécu.</p> <p>Comme j'étais fort chérie par ma tante et toute sa famille belge, surtout par Greta qui avait 18 ans, j'allais souvent chez eux. Leur grande maison, les salles d'expositions, l'atelier et surtout l'entrepôt des jouets devenaient mon terrain de jeu. J'avais accès et champ libre partout. J'appris vite la langue puisque toutes les personnes que j'y rencontrais m'adressaient la parole. Rapidement je lus tous les livres Spirou, Marsupilami, Tintin que je trouvais dans la maison. Le premier été, je fus également envoyée dans une colonie de vacances pour bien apprendre la langue, tandis que mes parents, avec mes frères, allaient à Bruxelles pour visiter l'expo '58.</p> <p>Assez rapidement maman a ressenti que les relations avec les deux soeurs de papa n'étaient pas aussi chaleureuses qu'avec ses propres soeurs restées en Hongrie. Papa aussi a bien compris que retrouver ses deux sœurs, après plus de 20 ans de séparation n'était pas ce qu'il avait espéré. En fait, ils ont peu vécu ensemble et sans leur mère, décédée trop jeune. Leur père n'avait pas réussi à souder la famille.<br class='autobr' /> Probablement pour mettre du baume sur la nostalgie de maman, à l'approche de notre 2ème Noël, notre grand-mère est venue nous rendre visite. Un de mes frères avait attrapé la jaunisse et était interdit d'école pendant deux ou trois mois. C'est à ce moment-là que grand-mère est venue.</p> <p>Elle m'a rapporté la grande poupée Dodo qui me manquait toujours. Cette poupée, aujourd'hui, se trouve chez moi. Je l'ai récupérée chez mes parents, après que ma nièce et mon neveu l'aient maltraitée dans leurs jeux d'enfants mais elle a survécu. La venue de grand-mère servait surtout à consoler maman qui avait le mal du pays.</p> <p>Le seul endroit où mes parents ne se sentaient pas dépaysés, c'était en allant à la messe le dimanche. C'était le temps où les messes se disaient en grégorien, il n'y fallait pas comprendre grande chose à cette époque. Ils étaient heureux de pouvoir vivre leur foi ici, en pleine liberté, et que nous, les enfants, fréquentions des écoles catholiques où la prière trouvait sa place avant les cours.</p> <p>Habiter à Poperinge devenait doucement trop lourd. Dans cette ville, il n'y avait aucune distraction. Si nous voulions faire une promenade, il n'y avait que le cimetière. Nous promener en ville attirait l'attention de tous les passants : nous étions les seuls étrangers dans cette ville et tout le monde nous connaissait et, rien que par leur regard, ils nous faisaient ressentir que nous étions différents d'eux.</p> <p>Après deux années, papa a trouvé à Anvers un autre travail. Il a loué une chambre dans la Maison Hongroise qui existait à l'époque et revenait toutes les fins de semaine avec des grosses oranges pour nous, les enfants, et des poivrons pour maman. Ces denrées alimentaires nous manquaient énormément, puisque indispensables dans toute préparation de la cuisine hongroise. Pour les grandes vacances 1950, papa a trouvé un appartement où nous avons déménagé. Nous y avons habité jusqu'à l'achat de notre maison, dix ans après.</p> <p>Papa voulut donc se détacher de notre premier enracinement belge. Le travail de transporteur de meubles ne convenait pas pour sa santé et il se sentait aussi devenir de plus en plus l'homme à tout faire de la famille. Il ne voulait pas non plus être dans l'obligation de rester redevable durant toute sa vie à ceux qui nous ont accueillis avec beaucoup de bienveillance. Ils nous ont aidés à redémarrer dans la vie, pour cela il restait reconnaissant, mais il ne voulait pas se laisser enfermer dans une non-liberté, en se mettant entièrement à la disposition de notre famille d'accueil.</p> <p>Vu son âge, déjà 45 ans, et ne connaissant pas aisément la langue, il était difficile pour papa de trouver un métier qui corresponde à sa formation. ll trouva une offre d'emploi dans un garage FIAT à Anvers, tout ce qu'il avait détesté dans sa jeunesse. Pourtant, grâce à son habileté manuelle, son savoir-faire et sa débrouillardise, il devint un ouvrier apprécié par son patron. Durant les 10 années qu'il y a travaillé, il s'est spécialisé dans la réparation, surtout des moteurs. Ensuite, ayant acheté une maison avec un grand garage, il devint son propre patron. Par ce travail bien stable, il a offert à sa famille un équilibre, une stabilité et un avenir.</p> <p><a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?article1136' class='spip_in'>Lire la suite</a><br class='autobr' /> </p></div> Mon pays, ma patrie (Elisabeth) https://agesettransmissions.be/spip.php?article1136 https://agesettransmissions.be/spip.php?article1136 2017-09-05T12:23:21Z text/html fr Sylvie (A&T) Religion, valeurs et éthique Solidarité <p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" Lire l'ensemble <br class='autobr' /> En déménageant à Anvers, mon enfance insouciante est restée à Poperinge. Je l'ai retrouvée encore quelques fois en retournant en vacances chez ma tante. <br class='autobr' /> Papa avait trouvé pour moi une école francophone, se disant qu'avec le français, j'irais plus loin qu'avec le néerlandais. Le temps d'affronter des difficultés commençait pour moi. Pour m'encourager, il s'inscrivit lui-même en cours du soir (...)</p> - <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164" rel="directory">Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration (Elisabeth H.)</a> / <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot160" rel="tag">Religion, valeurs et éthique</a>, <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot163" rel="tag">Solidarité</a> <img class='spip_logo spip_logo_right spip_logos' alt="" style='float:right' src='https://agesettransmissions.be/local/cache-vignettes/L109xH150/arton1136-e9aa4.jpg?1703435843' width='109' height='150' /> <div class='rss_chapo'><p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" <a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164' class='spip_in'>Lire l'ensemble</a></p></div> <div class='rss_texte'><p>En déménageant à Anvers, mon enfance insouciante est restée à Poperinge. Je l'ai retrouvée encore quelques fois en retournant en vacances chez ma tante.</p> <p>Papa avait trouvé pour moi une école francophone, se disant qu'avec le français, j'irais plus loin qu'avec le néerlandais. Le temps d'affronter des difficultés commençait pour moi. Pour m'encourager, il s'inscrivit lui-même en cours du soir pour apprendre le français et souvent je l'accompagnais. A cette époque, il ne connaissait pas encore bien les questions linguistiques de pays d'accueil. Le nouveau pacte scolaire de 1960 stipulait que chaque région ne devait avoir que des écoles dans sa langue respective.</p> <p>L'école où il m'inscrivit était une école privée fréquentée surtout par des enfants de diplomates. ll y avait une classe unique prévue pour tous les élèves en apprentissage du français. Seulement après la connaissance suffisante de la langue, nous pouvions retrouver notre classe respective. A peine le néerlandais bien appris, me voilà à recommencer dans une nouvelle langue.</p> <p>Cette fois-ci, je n'ai plus retrouvé la bienveillance à mon égard et je ne trouvais pas bien ma place dans cette école où les élèves étaient de confessions et d'origines différentes. Le cours de religion regroupait en une seule classe les élèves de différents niveaux. Je me souviens douloureusement qu'un jour, à mon retour de celui-ci, la titulaire de ma classe d'accueil me confisqua tout un paquet d'images pieuses, reçues juste auparavant, et qu'elle le jeta dans la poubelle. Ce geste m'avait bouleversée.</p> <p>Après deux années plus un trimestre, je suis retournée dans une école néerlandophone pour ne pas prendre encore plus de retard dans ma scolarité. Ce changement, en cours d'année déjà entamée, me coûta une année de retard : je changeais de section Moderne vers la section Latin-Grec. Tout au long de mes années d'humanités, je me suis sentie en décalage de deux années avec mes compagnes de classe, puisque née au mois de décembre, je suis entrée en première année primaire à 7 ans.</p> <p>Huit années après notre arrivée en Belgique, comme tous les autres Hongrois, nous avons fait la demande pour être naturalisés belges. A cette époque, la procédure durait deux années. Ayant obtenu sans problème les documents, nous avons commencé à retourner en Hongrie pour les vacances. J'avais 18 ans quand j'ai revu le pays de mon enfance et la famille hongroise qui s'était agrandie depuis les 10 dernières années.</p> <p>Mes deux frères qui avaient tout juste 21 ans, donc majeurs, ont remis à plus tard l'acceptation de la naturalisation, ne voulant pas faire de service militaire. Ils sont restés des 'étrangers' plus longtemps, ce qui n'était à leur avantage lors des demandes d'embauche. Ils sont devenus belges autour de leurs 27 ans en payant les frais administratifs. Ensuite, eux aussi ont commencé à redécouvrir le pays que nous avions quitté. Chacun y retournait à son propre rythme. Mais jamais plus nous ne nous y sommes retrouvés tous ensemble.</p> <p>Mes parents étaient-ils heureux d'être venus en Belgique ?</p> <p>Papa n'aurait jamais avoué le contraire. ll se sentait surtout libre de gérer sa vie et celle de sa famille comme il l'entendait. Maman a toujours gardé la nostalgie. Elle est toujours restée femme au foyer. En Hongrie, avant son mariage, elle gagnait sa vie et aidait sa mère veuve avec trois enfants, en travaillant comme couturière indépendante. Pour apprendre la langue, elle a essayé de travailler dans un atelier de couture à Anvers. Les jeunes filles avec qui elle travaillait, au lieu de l'aider dans l'apprentissage de la langue, se sont tellement moquées d'elle qu'elle n'a pas tenu bien longtemps. Sur ce point, papa trouvait plus important que les trois enfants aient une maman qui prenne soin d'eux plutôt qu'une maman qui aurait pu devenir une malade nerveuse dans un milieu hostile. Ainsi, maman n'a jamais vraiment appris la langue du pays. Plus tard, avec ma belle-sœur belge et les deux petits-enfants qui sont venus très souvent à la maison, elle a quand même appris les rudiments du néerlandais.</p> <p>Les années ont passé, nos parents ont sacrifié leur vie pour que nous, les enfants, nous puissions bien nous intégrer dans notre nouveau pays. Notre avenir a pris forme. Avec le temps, malgré sa nostalgie permanente, même maman avait compris que sa place était près de ses enfants et petits-enfants. Sa belle-fille flamande, qui avait bien adopté toute notre famille hongroise, y a certainement contribué activement. Mon frère et ma belle-soeur sont allés tous les deux ans en Hongrie pour leurs vacances avec leurs deux enfants. Maintenant que ces enfants sont devenus adultes, ma nièce avec son mari et leurs deux enfants respectifs continuent eux aussi ce rythme de vacances en Hongrie tous les deux ans.</p> <p>Jamais nous n'avons envisagé un seul instant retourner définitivement en Hongrie. La Belgique est devenue entièrement notre pays.</p> <p>Une fois les parents décédés ainsi que tous ceux qui nous ont connus comme enfants en Hongrie, les liens se sont écartés pour moi de plus en plus. En ce qui me concerne, j'y vais de moins en moins. C'est ici que j'ai tissé ma vie et je ne connais aucune nostalgie ou attirance majeure. Je ne le nie pas, quand je revois encore des membres de ma famille en Hongrie, je me sens tout à fait bien avec eux et ils nous font à chaque fois toujours la fête. Pourtant, une fois en dehors de ma vision, je les sens loin de ce qu'est devenue ma vie. Quand je reviens, après avoir passé des vacances là-bas, je sens bien qu'ici nous vivons d'autres valeurs, nous avons d'autres centres d'intérêt.</p> <p>Il faut savoir choisir clans la vie, une fois le choix fait, ne plus regarder en arrière. On ne peut vivre ici et ailleurs en même temps et nous n'avons qu'une seule vie à vivre. Notre avenir est devant nous.</p> <p>Souvent les hommes se rendent mutuellement la vie impossible. Des pays se font la guerre et certains sont contraints à faire des choix, en âme et en conscience, auparavant non envisagés. Mes parents ont fait leur choix avec des conséquences difficiles pour eux et pour leurs enfants aussi. Voilà que le rideau de fer et le mur de Berlin sont tombés, mais l'histoire se répète et la bêtise humaine ne tonnait pas de fin : d'autres murs s'érigent… Les réfugiés ne sont pas les bienvenus. Il nous sera toujours offert des occasions pour grandir en humanité en reconnaissant l'autre qui est différent comme un frère. Peut-être a-t-il aussi besoin de mon aide et de ma bienveillance ?</p> <p>Seule l'histoire nous dira où va notre planète avec ces brassages de populations. Moi, j'ai donné ma réponse : toute personne humaine a une valeur sacrée, cela personne ne peut le lui enlever. Nous sommes tous des frères et soeurs en humanité. Pour apprendre à gérer notre terre et la vie des hommes, apprenons à vivre dans un esprit honnête et fraternel. Que nous vivions dans un pays ou dans un autre, pour Dieu, cela n'a pas d'importance.</p> <p>La Belgique n'a pas été le paradis rêvé pour mes parents. Leur choix et leurs sacrifices m'ont permis de devenir celle que je suis aujourd'hui et cela est énorme. Jamais là-bas je n'aurais pu faire le choix de vie que j'ai fait ici. C'est la foi qui m'a ouvert la porte du bonheur. La bienveillance de mes parents et de mon entourage m'y ont aidée. De patrie, je n'en ai qu'une seule et je vis déjà dedans : c'est le Royaume de Dieu. Cette découverte c'est la Belgique qui m'a permis de le faire.</p> <p>Pour bien construire son avenir, je pense qu'il est bon de se remémorer les bienfaits dont nous avons été bénéficiaires. Il n'est pas bon pourtant de s'éterniser sur le passé c'est l'avenir qui est devant nous. Cet avenir je peux le recevoir comme un don, grâce à l'intervention de tous les intervenants du passé et ceux d'aujourd'hui. Parmi eux, Dieu s'est toujours déclaré 'présent' C'est une autre manière de lire sa propre histoire et celle de sa famille, si le coeur vous en dit, essayez.</p> <p><a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?article1137' class='spip_in'>Lire la suite</a></p></div> Etre implantée quelque part (Elisabeth) https://agesettransmissions.be/spip.php?article1137 https://agesettransmissions.be/spip.php?article1137 2017-09-05T12:23:18Z text/html fr Sylvie (A&T) Amour, mariage, divorce Religion, valeurs et éthique <p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" Lire l'ensemble <br class='autobr' /> Vers la fin du mois d'octobre 2016, une petite dame de 89 ans que j'ai appris à connaître il y a deux ans me téléphone. Elle me demande de l'accompagner à la Maison Hongroise où allait avoir lieu une séance académique à l'occasion des commémorations des 60 ans de la révolution d'octobre 1956. Beaucoup plus par esprit de serviabilité que par conviction personnelle, nous nous y sommes rendues. (...)</p> - <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164" rel="directory">Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration (Elisabeth H.)</a> / <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot135" rel="tag">Amour, mariage, divorce</a>, <a href="https://agesettransmissions.be/spip.php?mot160" rel="tag">Religion, valeurs et éthique</a> <img class='spip_logo spip_logo_right spip_logos' alt="" style='float:right' src='https://agesettransmissions.be/local/cache-vignettes/L150xH113/arton1137-d94d5.jpg?1703617991' width='150' height='113' /> <div class='rss_chapo'><p>Ce texte fait partie du feuilleton d'Elisabeth "Entre Hongrie et Belgique, un chemin d'immigration" <a href='https://agesettransmissions.be/spip.php?rubrique164' class='spip_in'>Lire l'ensemble</a></p></div> <div class='rss_texte'><p>Vers la fin du mois d'octobre 2016, une petite dame de 89 ans que j'ai appris à connaître il y a deux ans me téléphone. Elle me demande de l'accompagner à la Maison Hongroise où allait avoir lieu une séance académique à l'occasion des commémorations des 60 ans de la révolution d'octobre 1956. Beaucoup plus par esprit de serviabilité que par conviction personnelle, nous nous y sommes rendues.</p> <p>Par la suite, j'appris que toute une série de manifestations allaient avoir lieu ce week-end du 22-23 octobre conférences, témoignages, festivités à l'esplanade du Cinquantenaire, messe à la Cathédrale, suivie d'une procession de lumières jusqu'à la Colonne du Congrès, concert dans la grande salle de Flagey, et la sortie d'un livre avec les témoignages des Hongrois arrivés en Belgique il y a 60 ans. Je me suis donc plongée durant ce week-end dans mes racines pour expérimenter ce que j'allais ressentir.</p> <p>C'est vrai, c'était bien agréable de savoir que j'avais ma place quelque part dans tout cela, que je pouvais tout comprendre, participer activement aux chants, à la prière...</p> <p>J'ai rafraichi un peu ma connaissance historique des faits :</p> <ul class="spip"><li> la résistance en octobre '56 avait duré 20 jours ;</li><li> 33 années d'oppression ont suivi jusqu'à la chute du mur de Berlin en 1989 ;</li><li> 200.000 à 300.000 hongrois se sont dispersés dans tous les pays du monde ;</li><li> dont 2.000 à 3.000 en Belgique en un premier moment. D'autres ont suivi après.</li></ul> <p>A part cela, ayant côtoyé un millier de personnes durant ce week-end, je n'ai pas trouvé plus que cinq visages connus mais j'ai essayé d'entrer en contact avec quelques inconnus.</p> <p>Qu'est ce qui me lie encore à cette communauté hongroise à part la langue et une même origine ?</p> <p>Certainement pas un nationalisme qui par moment essaye de prendre le dessus. Notre vécu est si différent les uns des autres : les Hongrois de '56 et les autres, ceux que l'on appelle 'les nouveaux Hongrois de l'Europe' qui ont un pied en Belgique et un autre pied dans leur pays. Il y a ceux qui ont payé leur liberté en acceptant le déracinement de leur pays, les nouveaux arrivés d'aujourd'hui qui sont à la recherche d'une aisance économique et d'autres qui deviennent les nouveaux riches...</p> <p>L'abolition des frontières est une chose, vivre les uns avec les autres dans une même entente et le respect en est une autre. Des différences et des ressemblances, je peux en trouver dans chaque personne que je rencontre. L'approche et l'unité que je recherche avec l'autre, je dois d'abord les chercher et essayer de les vivre en moi-même.</p> <p>Bien assumer ses racines est une réalité à construire, un défi à relever. Une plongée démesurée vers ses racines peut signifier que l'on est toujours à la recherche de l'unité de sa personne. La nostalgie empêche de vivre le quotidien que la vie impose ou propose. Le déni de ses origines n'est qu'un camouflage de la vérité sans laquelle une vie sereine est impossible.</p> <p>Avoir aussi d'autres racines est une richesse que rien ni personne ne nous enlèvera. Elle nous donne une ouverture d'esprit avec la possibilité d'intégrer en nous toutes les différences. Vivre ici, tout en venant d'ailleurs, est aussi un atout pour voir clair et pour se distancier quand un nationalisme mal placé veut prendre le dessus.</p> <p>Il est bon de savoir que nous avons des origines implantées quelque part mais il est surtout important de savoir qu'avant toute chose, la plupart d'entre nous ont été implantés sous le coeur protecteur d'une maman, fruit d'un acte d'amour de deux êtres humains. Parfois ce premier implant fait défaut. Mais, même si les enfants dont la vie est accompagnée par l'amour de leurs parents ont une longueur d'avance, la vie est assez longue pour que chacun découvre que l'amour existe vraiment. Nous ne sommes pas égaux devant la vie et quelle que soit notre origine en venant au monde, se construire est la mission de tous et de chacun.</p> <p>Toute vie se déroule sous la pluie et le soleil, et les couleurs de l'arc-en-ciel sont les mêmes pour chacun de nous : le violet, l'indigo, le bleu pastel, le vert, le jaune-or, l'orange, le rouge, ces couleurs nous les retrouvons dans notre vécu. L'arc-en-ciel symbolise que le ciel et la terre sont reliés par un anneau de fiançailles qu'il nous est proposé d'accepter ou pas. Etre enraciné dans une terre est important, être relié par cet anneau de fiançailles est autrement important.</p> <p>Avant de découvrir que j'étais enracinée puis déracinée de mon pays, j'ai découvert que j'étais enracinée dans l'amour de mes parents qui ont tenu bon, à travers tous les orages de leur vie, parce qu'ils étaient eux-mêmes enracinés dans un amour plus grand qui précédait leur capacité d'aimer. Depuis, j'ai assumé mes origines.</p> <p>Je sais qu'il y a un Dieu bienveillant pour chacun de nous, qu'on le sache ou pas. Cet amour nous précède peu importe où mène notre vie. La découverte de cet amour m'a permis de vivre ma vie dans la recherche de la hauteur, la profondeur, la largeur et le tout, sans frontières.</p> <p>Puisque je ne peux vivre ma vie d'une manière désincarnée, je vis ma vie ici et maintenant. L'horloge du temps ne peut être tournée en arrière donc, je garde mon regard fixé vers l'avant.<br class='autobr' /> Rester toujours attentive au rythme que la vie me donne.<br class='autobr' /> Veiller à ne pas se laisser emporter par des vagues trop fortes.<br class='autobr' /> Garder jalousement l'unité et la sérénité acquises tout au long des années.<br class='autobr' /> Partager ce qui peut être avec celui ou celle qui cherche aussi des contacts dans un partage réciproque.<br class='autobr' /> Voilà comment j'envisage mon avenir.</p> <p>Un plus un font un (1+1=1). Une racine, plus une deuxième racine n'en font pas deux, mais font l'originalité de quelque chose de nouveau qui s'inscrit déjà dans l'éternité...<br class='autobr' /> A chacun sa route, à chacun son chemin.</p></div>