Ce texte est issu de notre recueil d’histoires vécues imprimé sous forme de livre « Et la lessive - Instantanés sur l’évolution de la femme au 20e siècle »
– Dis, pour une fois, tu ne me laisserais pas faire une machine à laver ? demandais-je insistante à Jean-François, mon compagnon, la trentaine.
Mais, tu n’en as pas besoin puisque je le fais, me répond-il. Et puis, tu sais, c’est plus simple si une seule personne s’en occupe !
Il est vrai que cela fait maintenant dix ans que j’ai pris l’habitude de voir Jean-François constituer méthodiquement des tas de linges, blancs et colorés, de programmer la répartition des lessives sur la semaine et de descendre et monter à la cave avec son panier tantôt vide tantôt chargé. Avec deux enfants en bas âge, cela fait quasiment une lessive par jour. Sans doute stimulé par son goût pour la propreté, il semble même prendre un certain plaisir à la tâche.
Et moi de reprendre :
Tu sais bien que, dans un couple, je trouve important que chacun soit capable de faire un maximum de choses seul. On ne sait jamais comment va la vie. Je pourrais demain me retrouver veuve ou séparée, ajoutai-je encore, provocante.
Ce n’est pas la première fois que je tiens ce discours, certes pessimiste mais combien réaliste lorsque l’on considère les statistiques des divorces et l’espérance de vie des femmes, toujours supérieure à celle des hommes.
Et la discussion de se clore là, moi trop accaparée par le tourbillon de la vie quotidienne que pour insister avec plus d’efficacité.
Par contre, le repassage, la cuisine et la gestion du nettoyage, c’est mon rayon…Bien que…tout récemment, Jean-François me téléphone au bureau :
Tu sais Sylvie, la femme de ménage vient de me prévenir qu’elle ne pourrait pas venir comme prévu cet après-midi. Alors, je rentrerai deux heures plus tôt ce soir pour vite nettoyer la maison avant le retour des enfants !
Et la vaisselle, me direz-vous en épluchant le répertoire des tâches domestiques, qui s’en occupe ? C’est encore Jean-François ! Et lorsque je lui propose de la faire, il me prend l’éponge des mains prétextant que je vais m’abîmer les mains et que …je ne sais pas faire une vaisselle correctement. Ce qui, je l’avoue, est vrai et m’arrange, ma foi, assez bien.
Cela peut paraître un peu incongru lorsque, avec des amies, Jean-François se met à parler de poudre à lessiver et autres produits plus miraculeux les uns que les autres mais, quand on y regarde bien, l’on verra que ce qui peut paraître une domestication de l’homme n’est finalement que le reflet d’un juste partage des tâches !
Il faut dire aussi que, travaillant tous deux à temps plein, nous contribuons à parts égales aux revenus du ménage et que nous partageons également totalement l’éducation des enfants.
Lorsque je vois mon fils de deux ans, accompagner fièrement son père lors d’une virile expédition à la cave, afin de mettre en route une machine à laver, je suis ravie de pouvoir vous annoncer que la relève est d’ores et déjà assurée !
Morale de l’histoire : plutôt que de perdre du pouvoir, mon homme est en train d’en gagner un autre : le pouvoir ménager. C’est un pouvoir qu’il me convient très bien de partager…mais pas de perdre.
Alors dans la liste de mes bonnes résolutions, outre l’apprentissage de la machine à laver, vous trouverez : prendre le temps d’apprendre à :

 faire fonctionner le lave-vaisselle ;

 faire des virements électroniques ;

 réapprendre à conduire – J’ai un permis qui, à ma plus grande honte, dort depuis dix ans dans mon portefeuille.

Et, si mon chéri acceptait, ça m’arrangerait d’apprendre à utiliser une foreuse.
Mais pour ça, c’est sûr, je devrai me montrer très convaincante !

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