La première fois que .... Quoi ? J’ai beau tourner la question dans tous les sens, je ne trouve pas. Comment ? Il doit y avoir des milliers de « première fois » dans ma vie et je ne me rappelle d’aucune ? Ce n’est pas possible. Mais si, mais si, je me rappelle ...

La première fois que j’ai été voter. Je prenais ça très au sérieux (encore toujours d’ailleurs). Comme j’étais très très flamande, je n’ai pas hésité et j’ai voté Volksunie. Le parti extrémiste flamand ! Une fois, je l’ai fait. Après j’ai compris et j’ai changé. Et depuis lors j’ai toujours voté pour les mêmes. Bien oui, je suis une fille fidèle.

La première fois que je suis entrée dans la cour de la Rijkshogeschool à Gand. Je voulais devenir Ingénieur en Electronique (la première femme en Belgique d’ailleurs). La seule école spécialisée dans ce créneau et qui acceptait une fille, était celle-là. Je suis arrivée et ... bien oui, il n’y avait que des garçons ! Plus que mille. Et moi. Moi, qui sortait de six ans de pensionnat. La cloche sonnait et tout le monde partait, les uns à gauche, les autres à droite. Et je restais là, je ne savais pas où aller. Et tout d’un coup, un petit monsieur (j’ai appris plus tard que c’était le Directeur) est arrivé vers moi et m’a conduite dans la bonne classe. C’était un cours de menuiserie ! On m’a mis un « St Joseph » (c’est une petit rabot) en main et je n’avais qu’à raboter une planche de bois ! Me voilà partie pour cinq ans de bonheur ...

La première fois que j’ai rencontré le roi Baudouin (eh oui, il y a eu une deuxième fois). C’était à cette école. Nous étions tous dans la cour. Et le roi a remarqué cette seule et unique fille. Il a marché vers moi avec toute sa suite et il m’a posé la question « mais qu’est ce que vous faites là ? ». On sentait très bien qu’il était plutôt pour la femme au foyer. Moi, j’étais tellement impressionnée que je n’ai rien pu répondre. Je n’ai que fixé ces chaussures. Qu’est ce qu’elles brillaient, mais brillaient ...

La première fois qu’un garçon m’a embrassée. J’avais treize ans. C’était au cinéma « Ons Huis » à Avelgem. Je n’ai pas aimé du tout. Je ne vais pas vous donner son nom mais il avait des dents « verdâtres ». Ca doit être à cause de ça que je n’ai pas aimé, parce que bien plus tard, j’ai bien apprécié.

La première fois que j’ai fait l’amour. J’avais quoi, vingt-deux ans, je crois. C’était très bien. J’ai tout de suite aimé et j’ai toujours aimé ça. Oh oui.

La première fois que j’ai été enceinte. Qu’est ce que j’étais fière. Je croyais que j’étais la seule à avoir réussi ça. Les neuf mois les plus heureux de ma vie. Et quand il bougeait dans mon ventre. De moi, il pouvait le faire tout le temps. Moi, qui étais plutôt garçon manqué, j’étais enfin heureuse d’être une fille. Les hommes ne connaîtront jamais ce bonheur. Eh oui, c’est bien d’être une femme.

Et la première fois que j’ai allaité. J’ai accouché vers 11h30-minuit. J’étais crevée. Je voulais dormir. Alors mon petit, c’était bien mais « laissez moi dormir ». Mais le lendemain matin vers 8 heures, on m’a apporté le petit et on me l’a mis au sein pour l’allaiter. Et c’est là que ça c’est passé. C’est là que je aimé mon fils vraiment, que je suis devenue une louve pour mon petit, que j’aurais pu tuer n’importe qui, qui lui aurait fait du mal. Il se tisse à ce moment un tel lien entre mère et enfant, c’est merveilleux. Sorry encore pour vous, les messieurs.

Et la première fois que j’ai mangé du foie gras. C’était à la Rotisserie d’Alsace, boulevard Jacqmain à Bruxelles. C’était une mini, mini tranche. C’était très bon, mais si peu. J’aurais bien voulu un peu plus, mais on me disait que c’était comme ça. Et bien, ce n’est pas vrai. Quelques années plus tard, nous étions au Château de Mercuez à Cahors. Et là, on nous a servi du foie gras à la cuillère. Et on est venu nous demander si on en voulait plus. Donc ...

Et la première fois que j’ai mordu à pleines dents dans une truffe. C’était chez Troisgros à Roanne. Pour le Réveillon. La truffe entière était enveloppée dans des feuilles (un peu) de choux. Quand j’ai mordu dedans, l’eau m’est sortie de tous côtés en même temps. Encore maintenant en y pensant, je dois avaler l’eau dans ma bouche. C’est Abel ou Kaïn qui a vendu son âme pour un plat de lentilles, moi ce serait plutôt pour une belle grosse truffe noire que je le ferais.

La première fois que j’ai « couru ». Mon mari devait, sur conseil de son médecin, faire du sport. C’était en 79 et c’était le début du jogging (en Belgique du moins). Alors, c’est ce qu’il a choisi. Il allait se mettre à courir. Moi, entre nous, je trouvais cela ridicule. Mais enfin, il insistait tant « ma chérie, viens avec moi... si tu m’aimes etc. ». Alors bien oui, je l’aimais, alors j’ai été avec. J’avais mis mes bottes en caoutchouc, des vraies Aigle, et j’avais prix ma minuterie de cuisine Terraillon que j’avais pendu à ma ceinture. On a fait un kilomètre en marchant et là on s’est mis à « courir ». J’avais indiqué une minute sur ma minuterie et, mon Dieu, qu’est ce que c’était long, mais long. ... Je croyais même que, à cause des chocs contre ma hanche, elle était déréglée. Mais non, elle a, finalement, sonné. Une minute, qu’est ce que cela peut être long !

Le lendemain on a recommencé et le surlendemain et je me suis mise à aimer ça. Tellement aimé qu’en 82 j’ai couru mon premier marathon (à Londres). Ben oui, je trouvais que 42 ans et 42km c’était le moment. Un kilomètre par année de vécu. Et j’ai bien fait ça. Mais je peux vous assurer que les 195 mètres de plus étaient, de loin, les plus durs.

Encore un souvenir : la première paire de chaussures que j’ai vendue. Mon mari avait été en Amérique et en était revenu avec l’idée de se lancer dans la vente de chaussures de course à pied. « C’est le moment, chérie ». Notre premier envoi était arrivé mais les ventes ne suivaient pas vraiment. Un jour, mon mari m’a envoyé notre premier client « particulier ». J’étais dans notre stock et j’allais servir le client. Je prends la chaussure droite, enlève le papier à l’intérieur et mets le lacet. Le client l’essaie et la trouve très bien. Je lui donne la chaussure gauche et là, le client me dit : « Tiens, c’est bizarre, j’ai deux pieds si différents, je ne savais pas ». Il marche un peu et vraiment cela n’allait pas ... Tout le monde a deux pieds différents mais ... à ce point là. Alors, j’ai compris et nous avons tous les deux attrapés un fou rire ! Je n’avais pas enlevé le papier à l’intérieur de la deuxième chaussure ! Je peux vous l’assurer, cela ne m’est plus jamais arrivé !

Et la première fois que ... Non, ça, non, je ne peux pas vous raconter ça. Non, ça je le tiens pour moi ...

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